Coups de coeur

Carrément BD

Il y a de cela quelques années, les éditions Glénat ont présenté une collection de BD de format carré qu’ils ont appelée: Carrément BD. Du fait de leur format atypique (30*30), cette collection n’a malheureusement pas pu être mise en avant par tous les libraires ou bien a tout simplement disparue des étagères. Nous avons fait le choix de continuer à vous la présenter en magasin en en sélectionnant quelques titres que je m’en vais vous décrire.

Outre son format original, Carrément BD a toujours fait appel à des auteurs utilisant un style graphique qui détonnait avec les séries classiques quelque soit l’éditeur, pour son Dracula, Hyppolite choisit la carte à gratter, c’est une technique où vous prenez une feuille qui a été recouverte d’une matière, en l’occurence noire, et à l’aide d’un outil (une lame de cutter par exemple) vous retirez de la matière. Alors qu’habituellement un dessinateur trace les contours de ses personnages et de ses décors, là c’est un travail un peu en négatif qu’il faut faire, vous ne touchez pas aux zones sombres (les pupilles de l’oeil, un vêtement noir…), les parties ombragées sont obtenues en enlevant seulement une partie de la couche de matière, puis pour les parties claires vous mettez le papier à nu. Ensuite l’artiste ajoute ou non de la couleur sur les zones mises à jour, comme vous vous en doutez l’auteur n’a pas vraiment le droit à l’erreur sous peine de tout reprendre à zéro. Pour le coup, je ne me suis pas trop attardé sur l’histoire étant donné qu ‘Hippolyte en a fait une très belle adaptation en respectant au mieux l’oeuvre originale.

Eric Omond et Olivier Supiot se sont associés pour un album magnifique: Le Dérisoire. Dire qu’il m’a fallu des années avant de pouvoir rencontrer les auteurs avant de pouvoir leur témoigner ma reconnaissance de lecteur. Le Dérisoire est le nom d’un navire, un bateau inachevé où vit seul son capitaine au beau milieu d’un océan immobile. Est-il si seul d’ailleurs ?

Ses fantômes l’accompagnent, des marins sarcastiques qui rechignent au travail et passent leur temps à se moquer de ce « capitaine de rien ». Il arpente donc son navire de long en large, de fond de câle où le fourneau se meurt petit à petit, au pont où là, il doit subir les railleries d’un oiseau de mauvais augure. Un jour tout bascule, alors qu’il marche sur le pont, le navire semble avoir pris vie, les couleurs sont rutilantes, et jallissent d’une cabine des gens de la haute société ivres de bonne humeur et de Champagne. La vue de ce capitaine bossu les émoustille et ils décident de l’entrainer dans les coursives du navire, bras-dessus bras-dessous, il ne reconnait en rien cet univers qui est pourtant le sien depuis déjà si longtemps, tout ce micmac est dû à Constance Imbroglio, cette femme charmante qui l’attendait dans sa cabine qui recèle encore bien des surprises à notre pauvre capitaine. D’un navire de commerce, elle en a fait une croisière de luxe fantaisiste, et à sa plus grande surprise, plus il s’enfonce dans le ventre du navire, plus il découvre un spectacle renversant, il va traverser des jardins luxuriants et se retrouver aux sommets de montagnes majestueuses. En plus d’une histoire incroyable, c’est un appel à la reflexion que les deux auteurs vous proposent.

Parmis les tous premiers titres proposés dans la collection, Moynot (l’actuel dessinateur des aventures de Nestor Burma) était l’auteur de deux titres, le premier, en collaboration avec Dieter s’appelait Monsieur Khol. Monsieur khol est ce singulier personnage en couverture de l’album en chapeau mou mais qui n’a pas de visage et pour cause…

Cet homme est tellement discret qu’il en même effacé, sa discrétion et sa réserve sont des avantages tout autant que des inconvénients: lorsqu’il s’est présenté au service militaire, les médecins l’ont oublié dans la salle d’attente ayant pour résultat qu’il a pu retourné à la vie civile; en revanche tous les matins, il aime avant de se rendre au travail, s’arrêter dans au café du coin, mais ce n’est seulement que lorsqu’il déplie son journal que le patron remarque sa présence, et comme à son habitude il commande un café pour se voir servir un verre de blanc. Le monde qui entoure Monsieur Khol ne fait pas attention à lui et encore moins à ce qu’il dit. C’est sur les conseilles de la gardienne de son immeuble, qui le trouve un peu palot, qu’il va prendre quelques jours de congés à la campagne dans l’auberge de la cousine de celle-ci, le grand air ne pouvant que lui faire du bien. Loin des tracas de sa vie citadine, ses traits vont apparaître sur son visage, sa personnalité va commencer à s’affirmer, mais les moments de détente ne durent pas toujours et Monsieur Khol va devoir reprendre la route pour Paris….

Pour Oscar & Monsieur O, Moynot est seul aux commandes et comme pour l’histoire précédente, nous nous retrouvons dans le Paris début XXe siècle.

Oscar est un jeune homme qui tente de gagner sa vie en soumettant des caricatures et autres dessins de presse aux journaux chaque semaine, comme tous les artistes de l’époque, il est souvent sans le sou et vit chichement dans un petit appartement sous les combles qu’il a bien souvent du mal à chauffer. Lui aussi, comme Monsieur Khol, est quelqu’un d’assez réservé, ou plus exactement, il a du mal à s’imposer et avoir confiance en lui. La solution à son dilemne, Monsieur O, un personnage que Oscar s’est inventé, son double qui n’a de cesse de le bousculer, de l’inspirer, celui qui lui glisse au creux de l’oreille ce qu’il devrait dire à ses interlocuteurs, employeurs et autres rencontres devant lesquelles il s’efface ou se plie à leurs exigences. Oscar va également faire la rencontre d’une jeune et jolie voisine, et l’imposant Monsieur O n’est peut-être pas la solution adéquate à la maladresse naturelle d’Oscar pour séduire la belle.

Il existe encore bien d’autres titres dans cette collection alliant l’originalité narrative et graphique, tous ne sont pas toujours disponibles et petit à petit risquent de disparaître du catalogue de l’éditeur, alors si vous êtes piqués par la curiosité, n’hésitez pas trop longtemps.

De nouvelles suggestions de lectures estivales

Encore une sélection de romans pour votre été, si j’ai abordé l’Héroic-Fantasy humoristique avec Les annales du Disque-Monde de Terry Pratchett, il existe son équivalent en Science-Fiction H2G2 le guide du voyageur galactique de Douglas Adams. Cette série de livres a été adaptée en épisodes radiophoniques, au cinéma. Nous restons dans l’humour déjanté britanique avec l’histoire de ce pauvre gars, bien ordinaire qui commence son histoire par un petit dejeuné dans sa cuisine et l’arrivée d’engins de chantier dans son jardin ne laisse présager rien de bon pour le reste de sa journée. Alors qu’il décide de faire un sitting devant chez-lui pour empêcher que sa maison ne soit rasée au profit d’un tracé d’autoroute, une vague connaissance vient le chercher pour prendre un, non trois derniers verres, car des instances extra-terrestres viennent de prendre la décision de faire disparaître notre bonne vieille planète terre. Son ami est en réalité un auto-stoppeur intergalagtique qui va l’entrainer dans une course folle à travers l’univers ce qui lui permettra entre-autre de connaître la réponse à la question ultime que tout le monde attend depuis quelques millions d’années. Il croisera en route un robot neurasténique et dépressif, un président à mulitple personnalités qui s »est fait la malle le jour de son investiture en volant le nec plus ultra des vaisseaux spatiaux, une race extra-terrestre très susceptible quant à la qualité de leur poésie qui tient pourtant de la pire torture qu’un esprit pas très sain est capable d’imaginer.

Des extra-terrestres toujours mais en Espagne cette fois avec Sans nouvelles de Gurb. de Edouardo Mendoza. Deux entités d’outre espace viennent d’attérir sur la péninsule ibérique, le capitaine envoi son second en exploration et ils restent en contact radiophonique. N’ayant pas d’apparence humaine, Gurb a bénéficié d’une métamorphose afin de passer plus discrètement parmis nous, c’est dans un panel d’images de notre civilisation qu’ils avaient reccueillis qu’il a choisi sa nouvelle apparence: Madonna; et lorsqu’il va être pris en stop son supérieur va perdre le contact, d’où le titre sans nouvelles de Gurb.

Après maintes hésitations, il va à son tour quitter le vaisseau à la recherche de Gurb et va causer bien des déboires à ceux qui croiseront son chemin car il faut bien l’avouer, leur étude n’a pas vraiment été très pointue dans l’étude de nos moeurs. Ce road trip vous amusera par sa stupidité et ses incongruités.

L’autre Dracula contre l’ordre noir de la Golden Dawn est la suite de l’autre Dracula de Tony Mark, si le deuxième revient sur les origines du célèbre comte, le premier opus regroupait les carnets de Jonathan Harker lors de sa séquestration dans les Carpates. Tout en respectant le style littéraire de Bram Stocker afin que l’on se prenne vraiment au jeu qu’il s’agisse de notes qui auraient été censurées lors de la publication de l’oeuvre originale, Tony Mark nous dévoile avec brio qu’elles ont été les occupations de ce pauvre clerc de notaire. On le savait un peu maladroit voir naïf lorsqu’il s’agit de séduire Mina, là pour le coup il va se faire déniaiser par le comte et tous ces beaux gitans ténèbreux qui le servent. C’est une parodie érotique qui démystifie le mythe du vampire plutôt classe et esthétique que l’on s’attend habituellement à trouver. Vous n’aborderez plus jamais l’oeuvre cultissime de la même manière et l’adaptation de Coppola restant dans les mémoires, vous aurez également le visage de Keanu Reeves dans ces positions (c’est le mot) scabreuses.

Vous avez le droit d’être de mauvaise humeur, mais prevenez les autres au Diable Vauvert de Céline Robinet, c’est un reccueil de plusieurs petites nouvelles qui vous étonneront de par leur sujets ou bien leur forme, véritable exercice stylistisque pour certaines ou bien l’auteur se lâche complètement, cet ovni vaut le détour pour toute la bonne humeur qu’il est capable de vous apporter. Un exemple de ce qui vous attend, une personne décide de se nourrir en ne se constituant des repas que d’une seule couleur, l’idée est donc de trouver des aliments correspondants à son choix du moment, mais une couleur a-t’elle sa propre saveur ? Dès lors, elle se met à manger de la couleur à même le tube et l’auteur joue sur la prononciation de son personnage qui essaye tant bien que mal d’avaler ce qu’elle a en bouche, pour vous donner une idée de ce que cela donne, bourrez-vous la bouche de chamallow ou de krissprolls, parlez à voix haute et essayez d’écrire ce que vous entendez en respectant cette nouvelle phonétique que vous venez de découvrir.

 

 

 

Faisons la part belle à la littérature nippone

Pour ceux qui se posent la question: pourquoi présenter de la littérature alors que nous ne vendons que de la bande dessinée, je leur répondrai: je suis chez moi, je fais ce que je veux. Et puis ça donne l’opportunité de vous pousser à vous rendre dans les autres librairies si vous les délaissez pour nous rendre visite. Avec ce premier ouvrage, c’est non seulement un pas vers la littérature, mais aussi vers le cinéma et un peu plus loin de la télévision… c’est un coup à faire le grand écart, et si vous regardez juste en-dessous de vous, vous verrez que le Takeshi Kitano fait même de la peinture. Je ne vais pas émunérer tous les titres de ses films, histoire de vous laisser faire une partie du boulôt. Si nous avons eu la chance de le connaître de part le monde, ce n’est autre que par le génialissime Jean-Pierre Dionnet qui avait acheté les droits de ses premiers films, que même les japonais boudaient et pourtant ses émissions de télé (au moins quatre hebdomadaires) cartonnent comme c’est pas possible.

Asakusa Kid paru chez Motif est le récit de son adolescence, comment il s’est lancé dans la vie professionnelle et comment de son envie de se lancer dans une carrière de boxeur, il en est venu à faire du stand-up dans un genre très populaire au Japon depuis l’après seconde guerre mondiale. Vous y découvrirez un quartier qui tourne autour du spectacle, du jeu et donc des yakuzas. Il y rend un vibrant hommage à son mentor, personnage illustre mais qui mourru dans le dénuement.

Takeshi Kitano a écrit plusieurs autres romans ou semi biographie quasiment tous traduits en France chez différents éditeurs, la totalité de sa filmographie est également disponible, le public français étant un de ses plus grand fan de par le monde. C’est artiste mélange adroitement la violence et la poésie et ce, toujours avec beaucoup d’humour et avec cette patte contemplative que l’on retrouve si souvent dans les cultures asiatiques.

Yoko Ogawa est une auteur très intéressante à découvrir avec ses récits où des gens ordinaires vivent de petites aventures extraordinaires. Avec La formule préférée du professeur publiée par les éditions Actes sud, nous faisons la connaissance d’une assistante ménagère qui travaille depuis un certain temps dans un organisme qui offre ses services. Lorsqu’elle découvre sa nouvelle affectation, le dossier de présentation de son nouveau client est accompagné d’anotations qui révèle qu’elle n’est pas la première à offrir ses services et le nombre de personnes qui se sont succédées ne lui laisse rien suggérer d’agréable. Elle est reçue par la belle soeur de son futur client, l’accueil est tendu et une fois les présentations faites, celle-ci ne veux plus avoir à faire à elle. La particuarité de son nouveau client est un sérieux handicap, en effet c’est ancien professeur de mathématiques, une référence dans son domaine, a subit un accident et il est maintenant doté d’une mémoire qui n’éxcède pas les 30 minutes, du coup, chaque jour elle doit se représenter à son employeur et si jamais elle s’absente pour une course et dépasse le délai, même chose. Pour pallier à cet inconvénient, le professeur est bardé de haut en bas de post-it pour toutes les informations qu’il doit se rappeler. Il ne travaille plus, mais pour satisfaire sa soif des nombres, il passe le plus clair de son temps à participer aux concours de mathématiques que les magazines spécialisés mettent en place,  il s’extasie à la moindre occasion de la présence des nombres dans notre vie notament des nombres premiers. Leur relation va prendre une tournure plus singulière lorsqu’il découvrira qu’elle est mère célibataire et exigera que l’enfant ne reste pas seul chez elle entre la fin des cours et son retour à la maison après son travail. L’arrivée de l’enfant dans le monde du professeur, accompagné de la curiosité et l’impatience propre à son âge, donnera au trio une relation pleine d’émotions.

Je vous conseille également La pièce hexagonale pour découvrir Yoko Ogawa, une nouvelle parue toujours chez le même éditeur.

Pour ceux qui préfèrent des ouvrages un peu plus conséquents et beaucoup plus barrés, deux ouvrages: Les bébés de la consigne automatique de Ryû Murakami aux éditions Picquier, et Dogra Magra de Yumeno Kyusaku chez Picquier également.

Ryû Murakami fait partie de cette jeune génération d’auteur japonais qui nous pondent des récits modernes et il faut l’avouer assez violents et dans ce roman il nous dépeint l’histoire de deux jeunes gens, victimes de ce phénomène de mode d’il y a quelques années, plusieurs femmes ont abandonné leur enfant dans des consignes de gare et très peu ont été retrouvés vivants. Ces deux enfants sont donc saufs et ont été mis ensemble dans le même orphelinat, une relation tellement forte étant née entre-eux, les parents qui vont s’y intéresser ne voudront les séparer et les adopteront ensemble. Si l’un est très expressif, l’autre est de nature réservée mais ils partagent toutes leurs expériences et leurs centres d’intérêts.

La vie amènera l’un d’entre-eux vers une carrière sportive de haut niveau tandis que l’autre goûtera au monde survolté du rock n’ roll et croyez bien que tout ne sera pas rose pour eux car avec un tel départ dans la vie, on en sort avec de sacrés traumatisme.

Dans le cas de Dogra Magra, c’est le genre d’histoire qui vous fait plonger dans un abîme dont vous ne sortirez peut-être pas indemne. Un homme se réveille dans une chambre d’un asile d’aliènés, il a perdu la mémoire et pourtant, les personnes qui se présentent à lui attendent beaucoup de lui. Un médecin a été assassiné, c’est celui qui le suivait, et dans les affaires de celui-ci, on a retrouvé une ultime note indiquant que son patient pourrait aider à résoudre l’énigme de sa disparition. Le premier indice est le récit d’un ancien pensionnaire du même service et les premières lignes de son récit sont identiques à celles de l’ouvrage que vous tenez entre les mains…

Tous ces ouvrages sont disponibles chez leur éditeur respectif, donc si vous ne les trouvez pas en rayon chez votre libraire en littérature, il pourra vous les procurer assez rapidement.

 

somewhere over the rainbow

J’ai fait le forcing pendant un long moment auprès de mes deux compères et j’ai eu gain de cause, du coup nous avons en magasin la série Rainbow de George Abe et Masasumi Kakizaki publiée par kaze. Et le mois dernier le 22ième et dernier tome vient de paraître et si d’un côté mon porte-feuille est soulagé, de l’autre je suis au regret de voir une si belle aventure se finir. Et oui, 22 tomes, c’est un sacré engagement de se lancer dans une série pareille, mais la bonne nouvelle, c’est de se dire que l’on ne va plus être dans l’incertitude de voir la fin et qu’en plus tout est disponible chez l’éditeur, contrairement à certains incontournables comme Vagabond ou Red Eyes que l’on ne peut même pas présenter en librairie.

Cette histoire débute 10 ans après la rédition du Japon, dans une maison de correction où 6 jeunes gens vont faire leur entrée. Mario Minakami (17 ans), Noboru Maeda (16 ans), Tadayoshi Tooyama (17 ans), Ryûji Nomoto (17 ans), Jô Yokosuka (16 ans), Mansaku Matsuura (17ans),  tous les six font partie de ces milliers d’enfants victimes des conséquences de la guerre et de la défaite du Japon. Livrés à eux même dans un pays en plein dénuement, ils ont plongé dans les coups fourrés ou la violence afin de survivre ou de protéger le peu qu’ils avaient. Ils vont faire la rencontre dans leur cellule d’un autre jeune homme, Rokurôta Sakuragi (18ans) qui va faire naître en eux des valeurs qui leur font cruellement défauts, la confiance, la solidarité ainsi que l’espoir, ils l’appelerons Anchan, le terme affectif et respectueux que l’on donne à un grand frêre;

Ils savent que tout ne sera pas facile, leur détention et la vie qui les attend à la sortie, aussi se font-ils la promesse de rester unis afin que chacun d’entre-eux puisse réaliser son rêve: devenir une star du rock, sortir avec une fille, manger à satiété, devenir champion du monde de boxe…

Au fil de la série, nous découvrons l’histoire d’un pays qui se reconstruit pendant l’occupation américaine, les traffics en tout genre florissent et permettent aussi bien de s’en sortir que de plonger dans les bas-fonds. Et lorsque le pays commence à s’en sortir économiquement, c’est une nouvelle forme de criminalité qui vient de et par l’étranger.

Je vous invite très fortement à passer le pas et découvrir cette histoire Humaine retranscrite par George Abe qui fait partie de cette  génération et qui a été somptueusement mise en image par Masasumi Kakizaki, si par contre 22 tomes, cela vous fait peur, le dessinateur a sorti un one-shot, hideOut aux éditions Ki-oon, une histoire en hommage à Stephen King et à son style fantastico-horreur.

C’est l’histoire d’un écrivain à succès qui va être victime de la crise comme tout le monde et se retrouver en rupture de contrat. Il ne peut se résoudre à l’avouer à sa compagne et accepte de devenir pigiste pour des romans de gare, et s’il veut garder le même standing de vie, il va devoir abattre une somme de travail considérable. Un drâme va venir bouleverser leur vie et ils vont profiter d’un voyage dans une île du pacifique pour renouer les liens de leur couple. Une petite ballade au milieu de la forêt dans la montagne, une panne et tout bascule.

Si Masamumi Kakizaki privilégie les décors très sombres dans chacune de ses histoires, il n’empêche que tout reste extrêmement lisible et on ne peut que rester bluffer devant son travail. Amateurs du genre n’hésitez plus et faites-vous plaisir.

Bonne lecture.

José Carlos Somoza

Il est de ces auteurs qui, lorsque vous commencez ses romans, vous n’arrivez pas à le refermer tant que vous ne l’avez pas fini, en tou cas j’y ai passé des nuits blanches. José Carlos Somoza est d’origine cubaine et vit actuellement en Espagne, après une carrière de psychiatre et de psychanaliste, il se consacre maintenant à la littérature et sa connaissance de la psyché sert amplement ses oeuvres. En plus d’être des oeuvres remarquables, elles sont publiées par les éditions Actes sud en france, ce qui en fait des objets agréables à lire et à avoir entre les mains.

Bon pour moi qui ne suis pas trop du genre polar, je reconnais que Mr Somoza m’a mis de grandes claques dans la g****e avec ses bouquins qui ont également l’originalité d’être pour chacun d’entre-eux un hommage à un genre littéraire différent à chaque fois.

Celui que je conseille en premier pour découvrir l’auteur est La caverne des idées, ce livre recèle deux textes qui s’entrecroisent, le premier étant l’histoire d’un jeune traducteur de grec qui se retrouve chargé de reprendre le travail de l’un de ses confrères qui vient de disparaître, le plus réputé en la matière et spécialiste des textes éidétiques. Ce sont des textes avec un message câché où l’on vous où l’on met une idée en tête sans jamais aborder le sujet directement, il se trouve que le jeune traducteur trouve une somme d’informations qu’apparement son prédécesseur n’aurait pas décelé. L’autre texte n’est autre que le travail en question, et là vous vous trouvez projeter dans la grêce antique ou deux hommes vont mener une enquête sur la mort d’un apprenti de l’école de philosophie retrouvé mort aux portes de la ville. Ces deux hommes se diffèrent par leur façon de raisonner et d’appréhender leur perception du monde, l’un philosophe se base sur ses impressions, l’autre est pragmatique et analyse les éléments concrets qu’il récolte au cours de son enquète.

Clara et la pénombre, en plus de ses hommages à la littérature, José Carlos Somoza aborde également les arts ou la science, et avec celui-ci nous touchons à la peinture. Nous sommes demain, mais demain c’est déjà un peu aujourd’hui, le milieu de la peinture encense le modèle vivant et Clara est l’un de ces modèles qui vend son corps pour des artistes qui mettent en scène des tableaux que les galeries et de richissimes particuliers s’arrachent à prix d’or. C’est un travail exigeant et n’importe qui ne devient pas modèle si facilement, la plupart suivent une formation et un entraînment rigoureux afin de tenir la position  et les contraintes de chaque oeuvre. N’oubliez pas que ce sont des livres à caractère policier et pour le coup, c’est l’apparition d’un tueur en série qui va dynamiser le récit. Le monde découvre une série de victimes, toutes sont ou plutôt étaient des modèles, le doute du temps de la conjugaison est permis car les meurtres sont également mis en scènes comme des oeuvres d’art. Il y a donc la police qui va enquêter au niveau mondial mais également les compagnies d’assurance spécialisées pour ce style artistique qui met en jeu des sommes collossales. Comme chacun de ses ouvrages, Clara et la pénombre amène le lecteur à se poser des questions ou des réflexions à titre individuel ou sur notre société et ses dérives.

Le personnage principal de Daphné disparue est un romancier, il se réveille dans un hospitâl et est sujet à une crise d’amnésie mais ses derniers souvenirs avant son aggression sont sa présence en galante compagnie dans un restaurant qui a ceci de particulier qu’il accueille beaucoup d’auteurs.  La présence de la jeune femme étant mise en doute, l’écrivain va mener son enquète et va se rendre auprès des différents clients présents ce soir là car il sait que chacun ne peut s’empêcher de prendre des notes de ce qu’ils observent à chaque instant. L’exercice d’écriture que José Carlos Somoza s’est imposé cette fois-ci, c’est que à la lecture de chaque carnet personnel, il se plie au style de chaque auteur, ainsi nous passons de l’essai biographique au style policier, de la poésie à l’oeuvre théâtrale… Tout cela serait très simple pour aider notre personnage si il n’y avait pas toutes ses différences entre les différents récits qui mettent sérieusement en doute la présence de la jeune femme à sa table et les mystères qui vont épaissir son enquête.

La dame n°13 quant à lui est un roman qui touche à la fois l’univers du théâtre mais surtout à l’importance du mot ou de la phrase. Certains mots, certaines phrases ou expressions peuvent avoir une importance et/ou une symbolique avec des sens ou des influences câchées qui jouent sur la psyché. Ce bouquin recèle une ambiance à la David Lynch, notament avec son Mulholand Drive, tant dans le récit que dans les décors où se déroulent les actions. La dame n°13 fait également référence aux muses et leur importance dans la création artistique.

José Carlos Somoza va également aborder l’oeuvre fantastique avec La clé de l’abime, reprise d’un titre de l’auteur de légende Lovecraft, la science au travers de La théorie des cordes ou encore le théatre dans le dernier ouvrage paru L’appât, qui décrypte cureiusement l’oeuvre de William Shakespeare.

Je vous invite donc à vous pencher très sérieusement sur cet auteur de génie publié par Actes Sud, dans leur collection Babel pour le format « poche » ou bien pour un coût moindre, mais le livre n’est pas aussi joli, en collection J’ai Lu.