Carrément BD

Il y a de cela quelques années, les éditions Glénat ont présenté une collection de BD de format carré qu’ils ont appelée: Carrément BD. Du fait de leur format atypique (30*30), cette collection n’a malheureusement pas pu être mise en avant par tous les libraires ou bien a tout simplement disparue des étagères. Nous avons fait le choix de continuer à vous la présenter en magasin en en sélectionnant quelques titres que je m’en vais vous décrire.

Outre son format original, Carrément BD a toujours fait appel à des auteurs utilisant un style graphique qui détonnait avec les séries classiques quelque soit l’éditeur, pour son Dracula, Hyppolite choisit la carte à gratter, c’est une technique où vous prenez une feuille qui a été recouverte d’une matière, en l’occurence noire, et à l’aide d’un outil (une lame de cutter par exemple) vous retirez de la matière. Alors qu’habituellement un dessinateur trace les contours de ses personnages et de ses décors, là c’est un travail un peu en négatif qu’il faut faire, vous ne touchez pas aux zones sombres (les pupilles de l’oeil, un vêtement noir…), les parties ombragées sont obtenues en enlevant seulement une partie de la couche de matière, puis pour les parties claires vous mettez le papier à nu. Ensuite l’artiste ajoute ou non de la couleur sur les zones mises à jour, comme vous vous en doutez l’auteur n’a pas vraiment le droit à l’erreur sous peine de tout reprendre à zéro. Pour le coup, je ne me suis pas trop attardé sur l’histoire étant donné qu ‘Hippolyte en a fait une très belle adaptation en respectant au mieux l’oeuvre originale.

Eric Omond et Olivier Supiot se sont associés pour un album magnifique: Le Dérisoire. Dire qu’il m’a fallu des années avant de pouvoir rencontrer les auteurs avant de pouvoir leur témoigner ma reconnaissance de lecteur. Le Dérisoire est le nom d’un navire, un bateau inachevé où vit seul son capitaine au beau milieu d’un océan immobile. Est-il si seul d’ailleurs ?

Ses fantômes l’accompagnent, des marins sarcastiques qui rechignent au travail et passent leur temps à se moquer de ce « capitaine de rien ». Il arpente donc son navire de long en large, de fond de câle où le fourneau se meurt petit à petit, au pont où là, il doit subir les railleries d’un oiseau de mauvais augure. Un jour tout bascule, alors qu’il marche sur le pont, le navire semble avoir pris vie, les couleurs sont rutilantes, et jallissent d’une cabine des gens de la haute société ivres de bonne humeur et de Champagne. La vue de ce capitaine bossu les émoustille et ils décident de l’entrainer dans les coursives du navire, bras-dessus bras-dessous, il ne reconnait en rien cet univers qui est pourtant le sien depuis déjà si longtemps, tout ce micmac est dû à Constance Imbroglio, cette femme charmante qui l’attendait dans sa cabine qui recèle encore bien des surprises à notre pauvre capitaine. D’un navire de commerce, elle en a fait une croisière de luxe fantaisiste, et à sa plus grande surprise, plus il s’enfonce dans le ventre du navire, plus il découvre un spectacle renversant, il va traverser des jardins luxuriants et se retrouver aux sommets de montagnes majestueuses. En plus d’une histoire incroyable, c’est un appel à la reflexion que les deux auteurs vous proposent.

Parmis les tous premiers titres proposés dans la collection, Moynot (l’actuel dessinateur des aventures de Nestor Burma) était l’auteur de deux titres, le premier, en collaboration avec Dieter s’appelait Monsieur Khol. Monsieur khol est ce singulier personnage en couverture de l’album en chapeau mou mais qui n’a pas de visage et pour cause…

Cet homme est tellement discret qu’il en même effacé, sa discrétion et sa réserve sont des avantages tout autant que des inconvénients: lorsqu’il s’est présenté au service militaire, les médecins l’ont oublié dans la salle d’attente ayant pour résultat qu’il a pu retourné à la vie civile; en revanche tous les matins, il aime avant de se rendre au travail, s’arrêter dans au café du coin, mais ce n’est seulement que lorsqu’il déplie son journal que le patron remarque sa présence, et comme à son habitude il commande un café pour se voir servir un verre de blanc. Le monde qui entoure Monsieur Khol ne fait pas attention à lui et encore moins à ce qu’il dit. C’est sur les conseilles de la gardienne de son immeuble, qui le trouve un peu palot, qu’il va prendre quelques jours de congés à la campagne dans l’auberge de la cousine de celle-ci, le grand air ne pouvant que lui faire du bien. Loin des tracas de sa vie citadine, ses traits vont apparaître sur son visage, sa personnalité va commencer à s’affirmer, mais les moments de détente ne durent pas toujours et Monsieur Khol va devoir reprendre la route pour Paris….

Pour Oscar & Monsieur O, Moynot est seul aux commandes et comme pour l’histoire précédente, nous nous retrouvons dans le Paris début XXe siècle.

Oscar est un jeune homme qui tente de gagner sa vie en soumettant des caricatures et autres dessins de presse aux journaux chaque semaine, comme tous les artistes de l’époque, il est souvent sans le sou et vit chichement dans un petit appartement sous les combles qu’il a bien souvent du mal à chauffer. Lui aussi, comme Monsieur Khol, est quelqu’un d’assez réservé, ou plus exactement, il a du mal à s’imposer et avoir confiance en lui. La solution à son dilemne, Monsieur O, un personnage que Oscar s’est inventé, son double qui n’a de cesse de le bousculer, de l’inspirer, celui qui lui glisse au creux de l’oreille ce qu’il devrait dire à ses interlocuteurs, employeurs et autres rencontres devant lesquelles il s’efface ou se plie à leurs exigences. Oscar va également faire la rencontre d’une jeune et jolie voisine, et l’imposant Monsieur O n’est peut-être pas la solution adéquate à la maladresse naturelle d’Oscar pour séduire la belle.

Il existe encore bien d’autres titres dans cette collection alliant l’originalité narrative et graphique, tous ne sont pas toujours disponibles et petit à petit risquent de disparaître du catalogue de l’éditeur, alors si vous êtes piqués par la curiosité, n’hésitez pas trop longtemps.

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